Il y a des athlètes naturels qui restent dans l’ombre et qui méritent d’être plus médiatisés. Nous allons y remédier grâce à cette nouvelle section « Culturistes naturels », que nous inaugurons avec Olivier Tovagliaro.

Q : Peux-tu te présenter à nos lecteurs ?

Je m’appelle Olivier Tovagliaro, 38 ans dont 23 ans de culturisme naturel. Dans le vie je suis informaticien.

Q : Quand et comment es-tu venu à la musculation ?

J’ai commencé la musculation à 15 ans et demi à l’entrée en seconde. J’avais trouvé une salle dans le centre culturel du quartier. Le genre de salle que l’on trouve de moins en moins. Aucun prof, j’ai dû me débrouiller seul. La musculation, je crois y avoir été amené par les photos de mon père. Il avait pratiqué l’haltérophilie et le culturisme et depuis des années je pouvais les apercevoir dans des cadres. Un copain en faisait déjà. J’ai alors tout de suite su ce que je voulais faire : du culturisme car j’ai toujours aimé les belles plastiques et la virilité qui se dégageait de ces physiques. Avant ma première inscription en septembre 1989, je faisais déjà des pompes et abdos depuis plusieurs mois. Le jour ou j’ai fait ma première séance, je crois que ma vie a changé.

Q : Ta passion de la musculation a-t-elle des répercussions positives ou négatives ?

Le culturisme se répercute généralement sur la vie professionnelle et personnelle. A mes débuts, j’ai privilégié le sport à mes études : 3 séances de 2 heures par semaines ! Ensuite, mes activités professionnelles m’ont toujours permis de pratiquer cette discipline. Evidemment, il y a des périodes comme lors de mon service militaire et une année de fac ou j’ai dû diminuer le nombre des séances ! Sur un plan plus personnel, il m’a été parfois compliqué de faire comprendre cette activité. C’est d’ailleurs plus qu’un sport : c’est une discipline de vie. Alors oui, difficile de faire entendre aux gens que vous ne mangez, parfois, pas de tout, que vous devez aller vous entraîner. Globalement, j’ai toujours su m’entourer de personnes compréhensives. Mais il ne faut pas oublier que cette discipline implique des choix de vie…

Olivier Tovagliaro

Q : Que penses-tu du bodybuilding actuel ?

Le bodybuilding actuel, est d’après moi très loin de ma pratique. Déjà parce que le terme bodybuilding a une connotation de compétition. La compétition amène la plupart du temps à dépasser ses limites et a utiliser des produits dit « illicites ». C’est pourquoi je préfère de loin le vocable culturiste qui rappelle un état d’esprit et une philosophie qui ont ma préférence.

Ceci rappelé, le bodybuilding actuel ne m’intéresse pas. En lui, on ne retient que les concours et les « gros » qui ne ressemblent plus à rien. Le pire, c’est que beaucoup d’athlètes les prennent comme modèle et en parle banalement. Mais encore, ils ne reflètent pas du tout la santé. C’est encore le pire à mes yeux. Alors le bodybuilding de maintenant, je ne peux m’y reconnaître.

Q : Quels sont tes exercices préférés ?

Bonne question ! Ils sont ceux qui me permettent les meilleurs sensations. Je peux en citer quelques uns comme le développé militaire barre (avant des épaules), le développé incliné avec haltère (haut des pectoraux), les tractions (dos), les dips (pectoraux, triceps), les curls haltères (biceps). Au cours de mes années de travail, j’ai bien souvent varié mes exercices. Par exemple, je reprends cette saison le développé nuque avec barre que j’avais arrêté depuis 5 ans par lassitude et inefficacité ; aujourd’hui, il me paraît un super exercice.

Q : Quel est ton programme type ?

Nous arrivons au cœur de ma pratique. En effet, je n’ai pas de programme type. Je veux dire que je n’ai pas de programme écrit que je suis « à la lettre » sous forme de cycle. Ma méthode de travail est basée sur la sensation musculaire et le travail à l’instinct. Ceci implique que j’ai développé au fur et à mesure des règles d’entraînement qui me conviennent.

Q : Et pour la nutrition ?

Pour la nutrition, je me suis longtemps abstenu de prendre des compléments alimentaires, entre mes débuts à 15 ans et demi et 1997. Je mangeais donc de tout. Il faut que vous sachiez que j’ai toujours eu de bonnes habitudes alimentaires inculquées par l’environnement familiale.

C’est à partir de 1997 que j’ai commencé à me supplémenter avec de la protéine (jamais de gainers). Avec l’age j’ai dû, et encore plus maintenant à l’approche de la quarantaine, faire attention à ce que je mangeais et surtout diminuer la quantité. Depuis 5 ans environ, j’essaie de manger le plus correctement possible (apport en protéine correct, moins de sucres rapides, plus de fruits et légumes, moins de lipides). De plus je bois très peu d’alcool.

Q : Quels sont tes points forts et faibles ? Comment travailles-tu tes points faibles ?

Définissons d’abord le terme « point faible » et donc « point fort ». Un point faible se définit par rapport à un point fort, et inversement, dans une approche globale de masse musculaire dont l’objectif est une plastique de type culturiste (je fais simple volontairement). Ca veut dire quoi ? Ca veut dire que si vous avez des « gros » bras et des petits mollets, ces derniers sont des points faibles. Mais aussi, si le bras droit et plus gros que le gauche, on peut aussi parler de point faible. Un manque de tonicité musculaire est aussi un point faible. Un point très fort (une cage énorme) peut aussi devenir un point faible pour l’ensemble du physique.

Vous l’avez compris, c’est subjectif et multi formes.

J’ai toujours privilégié l’esthétique au volume. Cela implique que mes points forts depuis toujours sont les bras (surtout triceps), quadriceps en galbe et volume. Je n’ai pas besoin de les bosser « à fond ». Mes points faibles sont les pectoraux (manque de volume en haut) et les épaules (pas assez large) depuis toujours, les mollets aussi en volume par rapport au bras. Je peux aussi dire que mes triceps masquent les épaules. De façon générale, mon point faible reste la sèche !

J’ai très longtemps travaillé tous mes muscles 1 fois par semaine (4 séances en moyenne par semaine). Mes points faibles, plusieurs fois dans la semaine. Je les travaillais en début de semaine et en début de séance. Voilà quelle fût ma méthode de travail pendant 20 ans environ. C’est à dire, pas grand chose. Depuis 3 ans, j’ai modifié radicalement ma façon de les travailler. Je les bosse plus souvent, je change constamment mes exercices dès que je ne ressens plus de progrès (je me fie toujours à mes sensations). De plus je bosse beaucoup moins intensément mes points forts.

En résumé : les points forts, je les maintiens. Je polarise mon énergie sur les points faibles.

Q : Est-ce que tu prends des suppléments ?

Depuis 1997, j’en prends régulièrement mais pas constamment. J’ai testé la créatine en 1997 quelques semaines, la L-Carnitine pour perdre du poids et du CLA à la même époque. La protéine a représenté jusqu’à 2010 90 % de ma supplémentation et quelques brûleur de graisse. Le reste, des vitamines de la pharmacie quand je me sentais faible. En 2010, pour ma première « sèche » j’avais pris des BCAA et glutamine en plus. C’est en 2012 lors de ma seconde sèche, que j’ai fait sérieusement dans une optique de concours (virtuel), que j’ai vraiment pris des suppléments : protéines de whey, BCAA, glutamine, complexe vitaminiques et un booster pré-séance.

Curieusement, en 2010 pendant 6 mois après ma « sèche », je n’ai rien pris. C’est là ou j’ai comblé une bonne partie de mes points faibles. De manière générale, je privilégie toujours la nourriture de qualité plutôt que les poudres et autres pilules.

Q : Quel est ton point de vu sur le dopage ?

Mon point de vue peut se résumer en 3 principes.

Le premier, est que les athlètes font bien ce qu’ils veulent. La compétition a toujours engendré le dopage et pas que dans le sport. L’argument des puristes qui consiste à dire que les athlètes qui se chargent jouent avec leur santé et trichent par rapport aux autres peut être démonté facilement. D’une part, la santé de quelqu’un doit préoccuper que lui même et d’autre part, la tricherie est partout dans la vie (au boulot, devant les impôts etc).

Le second, qui découle du premier, est que les athlètes ne devraient pas avoir à se cacher quand ils prennent des produits. Il faut assumer ce que l’on fait. Il faut dans le même temps accepter le regard et les remarques des autres ! On peut toujours rêver !

Le troisième est que tout le monde doit faire ses expériences, c’est comme çà que l’on avance dans la vie et aussi dans cette discipline.

Ce qui serait intelligent, c’est d’avoir des concours « avec produits » et d’autres « sans ». Vous savez aussi bien que moi que ce n’est pas possible. Il faut aussi avoir à l’esprit que les produits permettent 2 choses : soit de prendre de la masse musculaire ou de sécher en fin de préparation de compétition. Mais voilà, quand on n’a déjà pas une base saine et un physique adapté pour le culturisme, on ne l’aura pas plus après… mais on aura fait un trou dans le budget !

Pour finir, j’admire et respecte plus particulièrement les athlètes sains mais n’est rien à dire de plus sur ceux qui font le choix d’un autre chemin. Je les respecte tout autant, car quoiqu’il en soit, les séances, les privations, avec ou sans produits, ils faut les accepter et les endurer.

Q : Quels sont tes objectifs ?

Il sont au nombre de 5 :

  • Travail de l’esthétique globale en priorité.
  • Me faire plaisir avant tout !
  • Durer.
  • Rester en bonne santé.
  • Comme toujours, pas de prise de masse.

Q : Quels conseils donnerais-tu aux débutants, et aux avancés ?

Tout d’abord, il faut savoir pourquoi on fait de la musculation pour fixer des objectifs. Une fois fixés, il faut se donner réellement les moyens d’y arriver.

Dans la pratique culturiste, je dis toujours aux débutants de réfléchir à ce qu’ils font. Il faut avant toute chose apprendre les bases théoriques et comprendre le principe culturiste. J’entends trop souvent « je veux prendre de la masse » et je réponds de façon ironique « ben, mac do pizza ca va le faire ! ». Ou alors, des débutants qui ne parlent que de charge et qui oublient que la charge n’est qu’un moyen et pas un objectif.

Quelques conseils et réflexions (le top 10) pour une pratique saine et réfléchie de cette discipline :

  • L’excès n’est parfois pas la solution (nombre de séances, d’exercices, de calories, de compléments).
  • Gainage avant tout pour éviter les blessures.
  • Penser au cardio pour le cœur et optimiser le métabolisme.
  • Régularité dans la pratique.
  • Aimer l’effort physique et se faire du mal (du bien ?)
  • Le culturisme est une activité individuelle à la salle, pas collective.
  • Penser à parler peu lors des séances.
  • Tester et ne pas suivre aveuglement ce que l’on peut lire et entendre.
  • Ecouter ceux qui ont quelques choses à montrer… mais ne pas boire les paroles des « gros costauds ».
  • Travailler votre sens critique.

Et surtout, arrêter de lire certains magasines et préférer les sites sans contraintes publicitaire, comme AZBody par exemple.

Aux athlètes avancés dans le culturisme, je dirais ceci. Cette discipline permet de se bâtir un physique musclé avec des proportions et un galbe qui doit vous satisfaire tout en préservant votre santé; le tout dans la durée. Dans ce sport briller ne veut pas souvent dire durer.